Le spectre du polyhandicap

Etiologie

Le polyhandicap est un handicap causé par une atteinte cérébrale précoce grave; les causes étiologiques de cette atteinte sont diverses : d’origine prénatale, périnatale ou postnatale. Certaines anomalies chromosomiques et maladies dégénératives peuvent également constituer une cause de polyhandicap. Le taux de prévalence est d’environ 1 pour 1000. Malgré les différences étiologiques, les personnes polyhandicapées ont en commun la sévérité des effets causés par le polyhandicap sur leur développement et leur fonctionnement.

Définitions

À l’heure actuelle, il n’existe pas de définition du polyhandicap qui fasse consensus entre les littératures francophones et anglophones. Toutefois en comparant les définitions qui font référence dans chacune de ces cultures scientifiques, on s’aperçoit qu’elles s’accordent sur l’association caractéristique du polyhandicap entre de profondes déficiences intellectuelles et motrices et de fréquentes déficiences sensorielles, ainsi que sur la restriction extrême de l’autonomie qui en résulte (Groupe Polyhandicap France, 2002; Groupe Romand Polyhandicap, 2005; Hogg, 1999; Nakken & Vlaskamp, 2007; Saulus, 2008; SIRG-PIMD, 2001).

Ces déficiences sont interdépendantes : elles se potentialisent et s’aggravent mutuellement. En effet, le polyhandicap est de nature structurale, c’est « un tout formé de déficiences solidaires, tel que chacune, dans son expression, dépend des autres, et, dans sa nature, ne peut être ce qu’elle est, que dans et par son rapport avec les autres » (Saulus, 2008, p. 161). Cela rend toute compensation compliquée, et complexifie les soutiens à apporter aux personnes polyhandicapées. La définition de référence dans les pays francophones est celle du Groupe Polyhandicap France (2002) :

Le polyhandicap est une situation de vie évolutive spécifique d’une personne présentant un dysfonctionnement cérébral précoce ou survenu en cours de développement, qui a pour conséquence de graves perturbations à expressions multiples et évolutives de l’efficience motrice, perceptive et cognitive, et de la construction des relations avec l’environnement physique et humain.

Au début des années 2000, un groupe de chercheurs spécifiquement dédié au polyhandicap a été créé au sein de l’International Association for the Scientific Study of Intellectual Disability (IASSID) : le « Special Interest Research Group in Profound Intellectual and Multiple Disabilities » (SIRG-PIMD). Il propose une définition qui fait consensus dans la littérature scientifique anglophone :

Individuals with profound multiple disabilities form a heterogeneous group, both in terms of the origin of the disability as in terms of functional and behavioural repertoires. Chromosomal abnormalities, degenerative diseases, inborn errors of metabolism, congenital brain damage and the results of serious infections can all lead to a profound multiple disability. The ‘core group’ consists of individuals with such profound mental disabilities that no existing standardised tests are applicable for a valid estimation of there level of intellectual capacity and who possess profound neuromotor dysfunctions like spastic tetraplegia. Apart from profound intellectual and physical disabilities, it is presumed that they frequently have sensory impairments. (…)

Hétérogénéité

Si les personnes polyhandicapées ont en commun la sévérité des effets causés par le polyhandicap sur leur développement (Petitpierre, 2006), elles constituent un groupe très hétérogène, avec des niveaux de fonctionnement différents (Dalla Piazza & Godfroid, 2004; Munde, Vlaskamp, Vos, Maes, & Ruijssenaars, 2012; Nakken & Vlaskamp, 2007; Reid, Phillips, & Green, 1991; SIRG-PIMD, 2001; Vlaskamp, 2005a). Ainsi devrait-on accorder le terme « polyhandicap » au pluriel plutôt qu’au singulier, ou alors adopter la proposition terminologique de Nakken et Vlaskamp (2007), celle de « spectre du polyhandicap ». Ces chercheurs ont souligné la nécessité, à l’avenir, de distinguer des sous-groupes, au sein du spectre, afin de décrire leur fonctionnement et de mieux répondre à leurs besoins spécifiques. C’est ce que Saulus (2008, 2009, 2011) a réalisé en distinguant, sur la base de son expérience clinique, trois profils à l’intérieur du spectre de polyhandicap, qui se distinguent sur le plan psychodéveloppemental : les profils I, II et III de polyhandicap. Selon Saulus, une personne polyhandicapée peut, au cours de sa vie, passer d’un profil à l’autre dans le sens de la progression ou parfois de la régression ; il importe par conséquent de ne pas considérer ces profils comme des états figés.

Bibliographie

Dalla Piazza, S., & Godfroid, B. (2004). La personne polyhandicapée. Bruxelles, Belgique: de boeck.

Groupe Polyhandicap France. (2002). Définition du polyhandicap. Retrieved from http://gpf.asso.fr/le-gpf/definition-du-polyhandicap/

Groupe Romand Polyhandicap. (2005). Définition du polyhandicap. Retrieved from http://www.csps.ch/adresses-et-liens/reseaux/groupe-romand-polyhandicap

Hogg, J. (1999). People with profound intellectual and multiple disabilities: understanding and realising their needs and those of their carers. Retrieved from http://www.gov.scot/resource/doc/1095/0001692.pdf

Munde, V., Vlaskamp, C., Vos, P., Maes, B., & Ruijssenaars, W. (2012). Physiological measurements as validation of alertness observations: an exploratory case study of three individuals with profound intellectual and multiple disabilities. Intellectual and Developmental Disabilities, 50(4), 300–310. https://doi.org/10.1352/1934-9556-50.4.300

Nakken, H., & Vlaskamp, C. (2007). A Need for a Taxonomy for Profound Intellectual and Multiple Disabilities. Journal of Policy and Practice in Intellectual Disabilities, 4(2), 83–87. https://doi.org/10.1111/j.1741-1130.2007.00104.x

Petitpierre, G. (2006). La notion de polyhandicap en Suisse. CSPS, 103–107.

Reid, D. H., Phillips, J. F., & Green, C. W. (1991). Teaching persons with profound multiple handicaps: a review of the effects of behavioral research. Journal of Applied Behavior Analysis, 24(2), 319–336. https://doi.org/10.1901/jaba.1991.24-319

Saulus, G. (2008). Modèle structural du polyhandicap, ou : comment le polyhandicap vient-il aux enfants ? La Psychiatrie de l’enfant, 51(1), 153–191. https://doi.org/10.3917/psye.511.0153

Saulus, G. (2009). Le concept d’éprouvé d’existence. Contribution à une meilleure lecture des particularités psychodéveloppementales du polyhandicap. In S. Korff-Sausse (Ed.), La vie psychique des personnes handicapées. Ce qu’elles ont à dire, ce que nous avons à entendre (pp. 29–44). Toulouse: Editions Eres.

Saulus, G. (2011). Eprouvé d’existence et expérience du moi dans le polyhandicap, l’autisme et la psychose infantiles. In P. Ancet & Noël-Jean Mazen (Eds.), Ethique et handicap (pp. 307–326). Bordeaux: Les Etudes Hospitalières.

SIRG-PIMD. (2001). Newsletter Special Interest Research Group ‘Individuals with Profound Multiple Disabilities.’ Newsletter SIRG-PIMD. Retrieved from https://iassid.org/pmddap

Vlaskamp, C. (2005). Assessing people with profound intellectual and multiple disabilities. In J. Hogg & A. Langa (Eds.), Assessing Adults with Intellectual Disabilities (pp. 152–163). Malden, MA: BPS Blackwell.